Publié le 28 Mars 2012
Exraits tirés du livre :
"Comment inventer des histoires avec rien"
Editions Jupidort
Tout d’abord quelques précisions : cela se passe dans mon village au début des années 50, j’étais encore un pitchoun gari* à cette époque, et c’est bien plus tard que cette histoire vraie me fut racontée. La personne à qui est arrivée cette histoire est encore en vie.
Attention, j’enrobe l’histoire, autrement elle ne fait que dix lignes.
A la sortie de la guerre de 45 et même après, la vie était encore rude dans nos campagnes, certains se souviennent peut être encore du bouillon de corbeau, souvenir peu réjouissant.
Recette du bouillon de corbeau
L’on peut tirer un excellent bouillon des corbeaux (berk).
Il suffit pour cela de les plumer et vider, d'attendre qu'ils soient mortifiés*, de les saler à dose convenable, et de les faire bouillir jusqu'à ce que tout leur suc soit passé dans l'eau.
Le bouillon qu'on en retire est de la meilleure qualité, et l'on peut s'en servir pour tous les potages (re-berk).
* Une viande mortifiée est une viande soumise à un commencement de décomposition pour l'attendrir (vomir)
Tout cela pour vous dire qu’ici on mangeait encore les pies et les geais, en fricot avec des olives et pommes de terre, tout en sachant que ce sont des oiseaux opportunistes et à la limite charognards.
Oui, Jupi a mangé du fricot de geais, mais il y a très longtemps, maintenant je les laisse manger mes cerises en toute impunité.
Donc, revenons à notre brave chasseur un peu simple* qui s’appelle Marceou*. Il chassait comme tout le monde avec son vieux fusil à piston, antiquité héritée de son grand-père.
Il faut dire que les chasseurs chassaient pour amener de la viande gratuite à la maison.
Mais oui vous connaissez, ce sont ces vieux fusils que l’on recharge par le canon. Un peu de poudre, un bout de papier journal (comme ça les oiseaux manqués peuvent lire les nouvelles fraîches au passage, genre armistice de 14/18) puis on tasse avec la baguette, un peu de plomb en grenaille, encore un peu de journal (de cette façon les oiseaux peuvent lire l’autre page), puis on vérifie si les petites cheminées d’amorçage sont bien remplies et on met une amorce.
Ensuite on attend le gibier, et puis Pan ou Pchuiiiit et Boum, oui pchuiit cela veux dire que la cheminée était mal remplie et que le coup va partir, mais pas tout de suite, cela fait tout drôle de rester le fusil épaulé en train d’attendre que le coup parte, surtout si c’est un Tyrex Malinus Malinus en face de vous, je sais ils sont herbivores, et alors, les taureaux dans les arènes aussi.
Bon, prenons le coup du Pan sec et franc, là encore vous aurez des surprises, avant l’invention de la poudre T sans fumée, la poudre fumait énormément. Au bout du canon du fusil se formait un petit nuage blanc/gris opaque et vous ne saviez pas si le gibier était touché et si vous deviez utiliser le cas échéant le deuxième coup.
Donc la technique, était de faire quelques pas en avant pour traverser ce nuage digne des fumigènes des CRS (chasseur rapide et sûr) et de taper dans la patte du Tyrex. Attention « Tyrex pas content n’a jamais mal aux dents ».
Stooooooooooop !!!
Donc Marcéou, prenais son fusil, son carnier* sa quille de rouge, deux beaux oignons blancs du jardin, un bout de pain et quelques amandes, avec cela il devait faire tout de même quelques kilomètres pour retrouver son coin à gay, (non, il n’allait pas à la love parade) et rester la journée entière afin de remplir sa besace.
La suite demain.............
*pitchoun gari : petit garçon, ou petit rat.
*simple : tous les villages ont un simple ou plusieurs, mais plusieurs cela fait des doubles, putaing, je vais pas en sortir.
*Marcéou : Marcel.
*lou gay* : le geai.
*rabasse : truffe noire, fruit abondant et peu cher.
*carnier : besace en cuir pour mettre la carne, heuuuuuuu !!!!